Limites et civilisation

lundi 29 mars 2010, par Entropia

Après la catastrophe de Tchernobyl, le 26 avril 1986, les perspectives
des populations de différents pays se sont trouvées du jour au lendemain
modifiées si puissamment qu’une nouvelle forme d’identité commune
est apparue. Youri Bandajevsky considère que « La position qui
consiste à dissimuler l’étendue réelle des conséquences du désastre de
Tchernobyl, tout en répugnant à mettre en oeuvre les mesures qui
s’imposent pour protéger la santé publique, est inhumaine ». Son
engagement de médecin auprès des victimes lui a valu un séjour en
prison et il demeure interdit de séjour dans son pays.

Dans un entretien accordé à Entropia, au mois de décembre 2009,
Barbara Glowczewski fait le point sur la situation des Aborigènes en
Australie. Depuis plus de deux siècles, il semblerait que, malgré la violence
de la colonisation, la culture aborigène fasse preuve d’une étonnante
résistance, en particulier à travers l’art et la peinture. Les
Aborigènes « ont vécu pendant des millénaires avec leurs propres technologies
et leurs pratiques culturelles en relation avec ce que nous
appelons la nature. C’était un environnement indissociable de sa
dimension sociale et spirituelle, et c’est bien ce que racontent leurs
conceptions du rêve ».

Quand on tente de cerner les enjeux de la mutation en cours dans le
domaine de l’édition, on rencontre deux aspects importants : le statut
du régime de la pensée humaine et le devenir de notre civilisation. Pour
Serge Latouche, « le régime de la pensée humaine n’est pas indépendant
de ses supports et de leur utilisation ». L’inscription de la pensée sur un
matériau durable permet la transmission, tandis que le support oral a
la fragilité de la vie humaine. « La décroissance est une lutte contre le
désert et pour l’amour du monde. Seule la société de décroissance peut
sauver le livre ou tout au moins ce dont le livre est porteur. »

Hervé le Bras répond à trois questions de Thierry Paquot sur la
démographie. « Je ne connais pas de tentatives de décroissance démographique
au cours de l’histoire ». En revanche, on a de nombreux
exemples de recherches de la stabilité. Les cités grecques conservaient
un nombre limité de citoyens. Quand celui-ci devenait trop important,
elles créaient une colonie. Aujourd’hui, « le problème le plus important
n’est plus le nombre total des hommes, mais la structure de leur
consommation, celle d’hydrocarbures, et de plus en plus celle de nourriture
animale. » L’accumulation des hommes est le résultat de
l’accumulation du pouvoir.

La concentration comme la centralisation des activités économiques
sont non seulement un facteur de déséquilibre des territoires à l’échelle
nationale, c’est aussi une orientation dont les méfaits se révèlent
aujourd’hui dans toutes leurs conséquences. Simon Charbonneau, rappelle
les grandes lignes de ce processus entamé avant 1914 avec le
début de l’exode rural. Il fallait impérativement à l’époque liquider la
société rurale et l’agriculture paysanne au nom du progrès, une chanson
qui depuis est devenue une rengaine ! Mais, reconnaissons-le avec
regret, il aurait sans doute été alors plus facile qu’aujourd’hui
d’emprunter la voie de la décroissance choisie !

Dans le domaine des transports et qui prolonge les réflexions de la
contribution précédente, Jean Monestier fait la démonstration que la
mobilité sans l’automobile est possible et souhaitable pour des raisons
écologiques en particulier. Une mobilité comparable à celle qui existe
actuellement, mais indépendante des carburants fossiles, pourrait être
établie durablement en contournant le scepticisme des élus comme de
la majorité des électeurs. « Ce pourrait être, selon nous, un des buts de
mouvements citoyens comme les « villes en transition » que de franchir
cet obstacle à la mise en place de moyens de transport durables dans
les territoires de la décroissance »