Proposer

jeudi 4 novembre 2021, par Entropia

Pour Jacques Testart, il est urgent que la pensée de la décroissance intègre une réflexion qui débouche sur des propositions concrètes dans le domaine scientifique et dans les champs spécifiques que sont : la procréation, la contraception, la stérilisation, la sélection, la correction, la reproduction, la modification, la création. Autant de secteurs de recherches porteurs de promesses, mais aussi lourds de menaces. Il s’agit d’espérer qu’une autre « biopolitique » soit possible dans un monde apaisé. Mais pour y parvenir, « le rôle et les orientations de la recherche, comme la gestion des innovations, devront, de plus en plus, être soumis aux attentes véritables de la société ».

L’effondrement de la biodiversité est un indicateur majeur du caractère insoutenable du modèle dominant. Freiner la mondialisation au profit d’une relocalisation « implique d’une manière ou d’une autre, une décroissance ». Mais pour Ernest Garcia, cette décroissance doit être comprise comme « transition vers une société à échelle humaine », sans que soit exclue pour autant l’hypothèse d’un effondrement de la civilisation. Il ne faut pas oublier que « les soins palliatifs technologiques en phase terminale de la croissance sont seulement provisoires ». L’auteur propose enfin d’intégrer « quatre principes » pouvant atténuer, écologiquement et socialement, les effets négatifs d’une inéluctable décroissance.

Laure Dobigny, quant à elle, s’attache à présenter des pistes mettant en relation l’autonomisation énergétique locale et les prémices d’un changement social radical. Le développement et l’usage des énergies renouvelables doivent se dégager de l’idéologie technologique dominante. La pratique de la décroissance implique une sobriété énergétique induisant un autre rapport à la nature et une autre organisation sociale dans laquelle l’autonomie individuelle, comme celle des communes ou des villes, conduit paradoxalement à davantage de liens sociaux. Cette réorientation des modes de vie est déjà à l’œuvre. Elle doit être poursuivie.

Simon Charbonneau donne un exemple de cette réorganisation indispensable dans la politique des transports et des moyens de communication. Il montre que les capacités de résistance des populations à des projets de croissance d’infrastructures peuvent modifier les décisions politiques. « Dans le monde dominé par la fuite en avant vers “le toujours plus”, les postures de résistance sont dans tous les domaines une ardente obligation politique et morale ». Mais l’auteur rappelle un préalable incontournable à ces postures et à ces actions : il convient de distinguer au préalable « la décroissance subie de la décroissance choisie ». Il s’agit rien moins que d’une révolution politique et démocratique qui nous place face à un défi sans précédent, qui est un ultime « sursaut spirituel. Voilà où peut mener une réflexion sur la décroissance des transports ».

En effet, il n’y a pas d’alternative aux carburants pétroliers sans une remise en question du rôle des transports. Partant d’une analyse des relations entre la sécurité alimentaire, les revenus agricoles et les technologies de croissance soutenues par la politique agricole commune depuis un demi-siècle, les propositions de Paul Lannoye s’attachent, afin d’en sortir, à démontrer la démesure et l’impasse actuelle dans d’autres domaines d’activités. Il s’agit d’abord de renoncer à l’esprit de domination, puis de considérer « l’énergie comme clé du changement de paradigme ». Les techniques existent pour impulser un changement déterminant, mais la volonté politique reste inféodée à la logique dominante de la croissance à tout prix. Il faut privilégier un usage alimentaire des terres cultivables. Le recours aux ressources renouvelables et locales, comme aux techniques appropriées, implique que « soient levés les obstacles idéologiques et politiques » qui en interdisent la gestion conviviale, écologiquement et socialement responsable.